La mini Euskal-playlist !

Dans nos articles sur le Pays Basque on vous a un peu parlé de musique. Voici quelques groupes que nous vous conseillons.

Tout d’abord, deux groupes vus lors du Lizarrako Txoznak 2014  :

AnaiArrebakAnai Arrebak
Mélange de disco, d’électro et de rock, le tout chanté en basque, ce groupe se laisse bien écouter en concert. Pour un petit aperçu suivre le lien :
http://anaiarrebak.com/

PORTADA FINALZartako-k
Ils définissent leur musique comme du street-ska, pour vous éclairer un peu on dira que c’est du ska tirant sur le punk, notamment au niveau de la hargne du chant et par certains passages de gratte. Parfois quelques choeurs donne un petit côté oi! au tout ce qui n’est jamais désagréable après quelques patxaran !
https://myspace.com/zartakok/music/songs

Enfin, comment vous conseiller de la musique sans parler des groupes de Fermin Muguruza et de son frêre Iñigo, véritables icônes du rock basque (tout ça se trouve avec une simple recherche sur le net):

kortatu-cKortatu
Formation punk/ska mythique du Pays Basque, énormément de groupes reprennent leur morceaux qui sont devenus la bande son de toute une frange du militantisme basque dans les années 80. Pour commencer, nous vous conseillerons trois de leurs principaux titres : Zu atrapatu arte !, La familia Iskariote et enfin l’incontournable Sarri, Sarri qui s’inspire de l’évasion de membres d’ETA de la prison de San Sebastian.

negugorriakNegu Goriak
Deuxième formation des deux frères dans laquelle ils mélangent leur punk/rock/ska des origines avec le hip-hop qui fait son apparation au début des années 90. On note aussi quelques samples de musique traditionnelle basque sur certaines pistes. Toujours très impliqués politiquement, vous trouverez sur internet des vidéos assez impressionnantes de lives en soutien aux prisonniers politiques basques. Ils feront également des collaborations avec la Mano Negra.
On évoquera notamment le très bon titre Radio Rahim en hommage au personnage éponyme du film Do the Right Thing de Spike Lee sorti en 1989.

René Binamé : l’intervew

Pour ceux qui ne connaissent pas les René Binamé, il s’agit d’un groupe difficile à classer musicalement. On les range dans le punk, mais à l’écoute on comprend bien que s’ils ont l’état d’esprit punk, ils s’éloignent cependant volontiers de ce style musical. Chaque album est différent, tantôt avec des chansons amusantes et un synthé, tantôt avec des chants révolutionnaires, tantôt en flamand, tantôt en wallon, tantôt en français, bref leurs expériences musicales sont multiples. Atteignant bientôt 30 ans d’existence, ils sont l’un des plus anciens groupes de la scène punk encore en activité. Ça faisait un moment qu’on attendait de pouvoir les voir en concert avec Koma, ce qui a finalement eu lieu pas loin de Montpellier en juin dernier. L’occasion d’interviewer ce groupe emblématique devenait alors trop belle, nous l’avons donc saisie !
Résultat : une entretien durant lequel Binam’ (chant/batterie) revient sur le parcours du groupe, nous parle d’Étienne Roda-Gil et fait se croiser le situationniste Raoul Vaneigem et le chanteur de variété Mort Schuman.

binam2

M : Je vous écoute depuis que je suis ado. Vous avez commencé en 86, avant ma naissance et vous êtes un des seuls groupes que je connaisse qui ne se soit jamais arrêté. Comment voyez-vous cette continuité ?

Binam’ : Elle est là parce qu’elle est là. C’est pas un but, c’est pas une performance, c’est comme ça.
Il y a beaucoup de raisons d’arrêter un groupe. Parce que tu ne t’entends plus avec les gens avec qui tu le fais, parce que tu t’entends toujours avec eux, mais tu n’as plus envie de continuer, parce que tu es arrivé au bout de ce que tu avais envie de faire, parce que tu as envie de faire autre chose. Donc faire un groupe qui dure longtemps ça n’est pas mieux que faire un groupe qui dure pas longtemps. Il n’y a pas de record, c’est comme ça.
Titi : Tant qu’il y a l’énergie pour le faire, pourquoi ne pas le faire.
B : Tirer un groupe en longueur je crois que c’est affreux et je ne pense pas qu’on ait fait ça à un moment ou l’autre. Si ça a duré longtemps c’est parce qu’il y a du plaisir… Bon, il y a du relais c’est pas les mêmes gens qui jouent depuis vingt ans.

M : Qui est resté du groupe d’origine ?

B : Alors d’origine il n’y a que moi. En 95 arrive R-man et il est toujours dans le groupe. Ça fait quand même une grosse période ensemble. Smerf arrive pas longtemps après donc il y a une continuité1.

M : Il y a des changements de style au fil de votre parcours. Il y a eu une époque avec synthé notamment. Tout cela est assez atypique pour un groupe.

B : Dans ma tête, dans la tête des gens qui ont joué dans le groupe, on ne vise pas un style musical. Donc on ne change pas de style musical au sens où on se dirait : « Tiens, on faisait du ska, maintenant on va faire du punk ». Si le style musical change c’est parce que l’humeur est différente d’un jour à l’autre donc je ne le vois pas comme ça.
T : C’est une évolution au fil du temps.

M : Mais dans la pratique il y a peu de groupes qui varient autant.

T :  Peut-être parce que c’est des groupes qui vendent. Et puis c’est des styles qui marchent, donc ils se disent faut pas qu’on casse notre style sinon ça va moins bien marcher.
B : Moi je crois pas qu’il y a peu de groupes qui ne changent pas. Je crois qu’il y a beaucoup de groupes qui visent un style et qui restent bloqués dedans. Ça c’est vrai. Mais à côté de ces groupes-là il y a beaucoup de groupes qui se permettent de vivre en liberté avec leur musique et qui ne sont pas inquiets quand ils sont infidèles à une ligne musicale qu’ils n’ont jamais choisie. Je crois que ça n’est pas si rare que ça, mais le contraire est fréquent et il prend beaucoup de place.

M : J’ai lu dans une interview du fanzine Niaproun2, que vous aviez testé la techno parce que tout le monde disait que c’était nul, que vous avez fait des trucs politiques parce qu’on vous prenait pour des rigolos, et qu’après les chansons politiques vous avez refait des morceaux rigolos. Est-ce que vous cherchez à être inattendu, à surprendre votre public ?

B : Les deux exemples que tu as donné, ça l’a été. Mais cela concerne notre microcosme belge où durant une période on était considérés par les gens qui nous entouraient comme un groupe rigolo. Donc on a mis en avant notre volonté de faire des morceaux qui avaient un message, qui disaient quelque chose et on a mis de côté notre humour parce qu’il prenait trop de place. Et puis à un moment on a fait le contraire, mais ça concerne notre microcosme belgo-belge. Quand on a été un peu plus loin on a été libérés de ça. Quand on a été jouer en Suisse ou en France on a été débarrassés de notre background de clowns du début.

M : Donc ça veut quand même dire que lorsque vous sentez qu’on vous colle une certaine image vous avez envie d’en sortir…

B : Pas que, mais oui.

M : Vous ne voulez pas rester dans une case qu’on vous attribuerait.

B : Et qu’on s’attribuerait, nous-même d’ailleurs !

M : Votre album 71-86-21-36 est le plus connu. Est-ce que ça ne vous agace pas un peu parfois ?

B : Des fois, pas toujours. Que ça nous ait agacés c’est peut-être un grand mot, mais la réponse à cet agacement c’est Kestufé Du Wéék-End ? Justement, c’est un album où il n’y a pas de reprise, où il y a des morceaux qu’on avait écrits nous-même. On faisait nos morceaux anti-capitalistes et anti-économistes, c’est comme ça qu’on l’avait dit, et nos morceaux plus absurdes.
Mais 71-86-21-36, pourquoi il existe ? Dans le parcours de vie des gens du groupe à ce moment-là, il y a des morceaux qu’on entendait et qui nous semblaient importants. Et puis au bout d’un moment on a eu envie de les transmettre par la suite, c’est ce qu’on a fait. Il a un rôle, une utilité concrète, il sert à quelque chose ce disque. C’est pour ça qu’il a été fait, pour que ces morceaux continuent à vivre.

M : Alors justement, on se rapproche du sujet de l’anarchisme, Koma avait une question.
Koma : Vous avez joué à Saint-Imier3, ça a dû être un moment fort j’imagine ? Comment vous l’avez vécu ? Quelle place a ce concert dans votre parcours ?

B : Quelle place dans le parcours, je ne sais pas trop. Je vais te dire comment je l’ai vécu. La première chose que j’ai appréciée dans le fait d’y avoir joué, c’est d’y être et ce que j’ai apprécié dans le fait d’y être c’est de voir comment ça s’est passé. Ce que j’ai aimé c’est la rencontre avec toutes une série de manières d’appréhender l’activisme anarchiste. Il y a des gens qui ont des points de vue extrêmement différents : il y a des gens qui visent une espèce de transmission de la culture anarchiste, il y en a qui visent autre chose qui concerne plus la vie de tous les jours avec le prix libre, le veganisme et d’autres choses comme ça. Ces manières de voir les choses se sont opposées pendant ces quelques jours. Mais je crois qu’en se rencontrant, elles sont entrées en débat.

K : Ça c’est frité un peu je crois…

B : Oui mais ce fritage il était vraiment intéressant. Il y a eu une action des vegans sur le barbecue à L’Espace Noir4, il y a eu une revendication du prix libre à l’entrée du concert de René Binamé, des choses comme ça. Mais tout ça, ça fait des débats qui ont ouvert des questions. Il y a des gens qui se sont vus assaillis par d’autres qui voulaient le prix libre. Je crois que ce débat n’était pas inutile donc je pense que cette rencontre internationale des anarchismes de toutes sortes, elle a fait se rencontrer des gens qui ne se connaissaient pas. Je crois qu’elle était bien intéressante pour ça. Ils se sont bien engueulés, hein !  Mais en s’engueulant ils se sont mis à discuter.

T : Faut voir comment ça se passera la prochaine fois !

B : Mais les rencontres qu’il y a eu c’est impressionnant, les cuisines collectives qui venaient d’un peu partout. Franchement c’était bien et les engueulades étaient nécessaires et constructives, je crois !

binam3

M : D’ailleurs c’est amusant que ce rassemblement ait eu lieu en Suisse, un pays qu’on ne considère pas forcément comme très « anarchiste ».

B : On discute parfois dans la camionnette de choses et d’autres et on discutait tantôt de la définition du mot punk… Mais le mot anarchiste c’est impressionnant le nombre de définitions qu’il a lui aussi, le nombre de personnes qui peuvent avoir des styles de vie et d’interprétations du monde différents et qui se considèrent les uns et les autres comme anarchistes… Quand ils sont capables de voir qu’on peut se considérer anarchiste de manière différente, c’est intéressant, mais certains peuvent être étonnés de voir quelqu’un qui vit différemment et qui dit : « Je suis anarchiste ! Toi aussi ? Tiens c’est bizarre ! Pourquoi tu me laisses pas entrer au concert sans payer ? »

M : Je reviens à 71-86-21-36. Sur cet album vous reprenez La Makhnovtchina, en ce moment la crise ukrainienne continue et on a vu que des nationalistes reprenaient l’image de Makhno. L’avez-vous vu, et si oui comment le comprenez vous ? Avez-vous une idée là-dessus ?

B : Non, je n’ai pas vu, mais je me doute que c’est possible. Le problème c’est que Makhno est mort trop tôt. Il est mort pitoyablement à Paris5 et il n’a pas pu transmettre ce qu’il avait fait.

M : À propos de cette chanson vous l’attribuez sur la pochette du disque à un certain Atourof, pourtant j’ai lu qu’elle est d’Étienne Roda-Gil. Cela m’a étonné vu qu’il était aussi le parolier de Julien Clerc, Johnny ou encore Claude François…

Gredin : Oui, mais c’était le président d’honneur de la CNT…

B : Et de la SACEM… (rires)

M : C’est compatible ça ?

B : Ben, en tant qu’artisan-auteur, c’est pas forcément si incompatible que ça. Ça dépend de quel angle tu le vois.

G : Il travaille quoi.

B : C’est un syndicat la SACEM…

M : En attendant c’est amusant de voir le contraste entre Julien Clerc ou Claude François et la Makhnovtchina.

B : D’après Étienne Roda-Gil, Le Lac Majeur par Mort Schuman (qui chantait Papa Tango Charlie), est un morceau qui lui a été inspiré par un épisode de la vie de Michel Bakounine. C’est écrit comme ça sur les notes intérieures d’une pochette de disque. C’est le feu d’artifice que Bakounine a fait sur le Lac Majeur à la fin de sa vie.

[Binam’ revient ici sur le fait qu’ils n’ont pas crédité Étienne Roda-Gil pour La Makhnovtchina.]
Concernant Étienne Roda-Gil, il y a ce morceau-là [La Makhnovtchina] sur Pour en finir avec le travail. C’est un disque qui a été fait en 1970 par Jacques Leglou et d’autres, des gens proches des situs et qui avaient envie de faire un disque populaire, révolutionnaire, patati patata… Du coup, sur ce disque il y a La vie s’écoule, la vie s’enfuit de Raoul Vaneigem, La rue des bons enfants de Guy Debord et d’autres chansons, mais elles sont attribuées à d’autres gens. La rue des bons enfants est attribué à Raymond la Science de la bande à Bonnot, par exemple. Et puis ces histoires-là ont été répétées pendant des années parce que cette pochette de disque avait l’air sérieuse. Quand on a repris le morceau on y a cru. On a su que c’était faux lorsque que le disque a été réédité en 2000 et que ceux qui l’ont réédité ont rétabli les vrais noms… Ou ont inventé d’autres canulars !

K : Je voulais savoir si Raoul Vaneigem6 ne vous avait pas trop fait chier pour les droits de la chanson La vie s’écoule ?

B : Non, mais on s’est posé la question avant ! (Rires) Non, on ne s’est pas posé la question pour lui, mais on s’est posé la question pour d’autres, lui on s’est dit : « C’est pas possible !»

K : Et comment est venu le fait que vous repreniez cette chanson ? Même si ça paraît logique.

B : Comment ce morceau est arrivé jusqu’à nous ? Comme tu dis c’est logique. Comment ça nous est venu… C’est Radio Air Libre, une radio libre bruxelloise, qui passait ce morceau et d’autres en boucle. En fait sur 71-86-21-26, c’est des morceaux qui passaient sur cette radio, qu’on a entendus et  enregistrés pour les partager. Ceci dit La vie s’écoule n’était pas dessus, donc c’est une suite.

K : Oui c’est sur l’album le plus récent, La vie s’écoule en 2011  [71-86-21-36 date de 1996]. Il a eu un traitement spécial celui-là, avec un joli clip aussi ! Il a été bichonné !

B : Oui il a eu un traitement spécial, il a fallu plus de temps. Alors que 71-86-21-36 a été fait de manière extrêmement brouillonne, c’est le disque qu’on a enregistré le plus vite et le plus mal, mais on en est très contents.

M : C’est fou, c’est celui qui a le plus de succès !

B : C’est impressionnant ! On a perdu le disque dur en cours de route donc on a dû récupérer les mixs ratés du début qu’on a mis quand même dans le final. On s’était dit on sort un disque… T’as écrit ça ? Non mais c’est vrai, mais il fallait pas le faire autrement. Il y avait une urgence, il fallait le faire comme ça et puis merde ! C’était notre spontanéité du moment. On l’a pas bien fait, mais on l’a fait !

M : Avant de terminer cette interview j’aurais voulu savoir quels sont vos projets pour le groupe à l’avenir ?

B : Joker ! (rires)

Là-dessus les gens du KJBI nous ont gentiment fait comprendre que ça serait sympa de lever le camp car ils allaient boucler la salle. Ça tombait bien on avait finit. Avec Koma nous avons donc chaleureusement remercié les René Binamé et avons pris nos clics et nos clacs ! Bon courage au KJBI, on espère reparler de vos soirées une prochaine fois ! ■

Par M. et Koma.

1 : La composition du groupe est mouvante suivant la disponibilité de ses membres. Pour ce concert Binam’ était accompagné de Titi et Gredin.
2 : Niaproun : http://www.niaproun.net/.
3 : Du 8 au 12 août 2012 à Saint-Imier, village suisse, s’est déroulée la Rencontre Internationale de l’Anarchisme. Le rassemblement célébrait également les 140 ans de ce courant politique dont la “naissance” avait eu lieu en 1872 dans ce village.
4 : Un des lieux centraux du rassemblement.
5 : Makhno en exil à Paris sera ouvrier un bref moment chez Renault. Affaibli par les blessures subies lors de ses combats en Ukraine il ne pourra plus travailler et mourra peu de temps après.
6 : philosophe de l’Internationale Situationniste, mouvement politique révolutionnaire ayant existé entre 1957 et 1972.

René Binamé au KJBI (14/06/2014)

Il faut bien le dire René Binamé est un de mes groupes préférés. Je l’ai découvert ado en récupérant des mp3 sur Internet. Si j’avais bien aimé, surtout leur album 71-86-21-36, je n’avais pas creusé plus et n’étais pas plus fan que ça. Au point que je me souviens être allé à une soirée à Périgueux en 2008 ou 2009 où il jouait avec Guérilla Poubelle et que j’étais dehors à boire des bières pendant leur set… (je me flagelle chaque fois que j’y repense). Depuis, du temps a passé et j’ai appris à mieux apprécier leurs chansons. J’espérai les voir en live un jour pour réparer cette erreur de jeunesse !

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René Binamé. Flous.

Cette occasion s’est présentée le samedi 14 juin. Le trio belge (pour cette soirée en l’occurrence franco-belge) se produisait au KJBI, bar associatif à forte tendance punk qui vient d’ouvrir au Crès juste à côté de Montpellier. Ni une ni deux, en apprenant ça j’ai tout de suite prévenu quelques comparses susceptibles d’être intéressés. Il n’y a finalement que Koma qui m’a répondu présent et qui m’a accompagné.

Le début des hostilités annoncé pour 21h, on se pointe dans ces eaux-là après avoir englouti une pizza. Pas grand monde devant la salle, il faut dire que l’info n’a pas beaucoup tournée. Pour en avoir discuté avec quelqu’un de la salle (je ne sais plus son nom, désolé) l’asso n’a pas eu le temps de faire la com’, trop occupée par les travaux à réaliser. Du coup ils se sont limités à Facebook (grrrr!), mais la personne m’a assuré qu’ils allaient faire un site Internet (ouf!), on vous tiendra au courant.

Lazy Doll Factice en pleine action !

Lazy Doll Factice en pleine action !

C’est le groupe FightOrPeaceMotte qui ouvre le bal. C’est un peu difficile pour eux étant donné qu’il y a encore peu de monde. Pour ne rien arranger le son est très fort et on ne comprend pas grand chose à ce qui se dit. C’est dommage parce qu’ils ont de l’énergie et un jeu de scène sympa. Pour avoir écouté leur disque que le gratteux m’a filé pendant la soirée, je peux vous dire que c’est plutôt sympa. C’est du punk-rock comme les montpellierains semble savoir en faire, quelque part entre les Shériff et les Molards.

Lazy Doll Factice, est le groupe suivant. Pour les avoir déjà vus je savais qu’ils envoyaient. Même si c’est pas trop mon style de punk (à grosse voix), en concert c’est efficace. Malgré une alcoolémie déjà bien avancée au moment de monter sur scène ils arrivent à nous produire un set qui tient à peu près la route et qui est plutôt marrant. En revanche pour eux aussi le son est vraiment pourri, dommage.

Arrive enfin ceux pour qui nous sommes venu avec Koma : René Binamé ! Ils installent leur propre sono, ce qui nous laisse espérer un son un peu meilleur que pour les précédents groupes. Cela se confirme dès le départ ! Le trio attaque son set et durant le premier quart d’heure je m’inquiète de la durée du concert tellement ils enchaînent vite, sans pause entre les morceaux. Je voudrais les voir plus de 30 minutes ! Finalement ils reprennent une cadence un peu plus normale. C’est pas que c’est plus lent, j’ai trouvé d’ailleurs que certains morceaux étaient plus péchus en live que sur les albums, mais ils prennent plus leur temps. Évidemment quand ils en arrivent à jouer La Makhnovtchina ou Juillet 1936, le public chante avec eux en chœur. Ça confirme la question que je voulais leur poser, à savoir si ça ne les agacent pas que ça soit leur album 71-86-21-36, où sont enregistrées ces chansons, qui ait le plus de succès. Enfin j’y réfléchis pas trop non plus à ce moment-là, j’ai arrêté de compter les bières et je chante aussi, faut pas croire.

Le concert se termine et avec Koma on se dit (en gros) : « Putain on les a vu ! » On discute un peu à droite à gauche. Quelqu’un a remarqué qu’on avait laissé traîner quelques zines. Le gars s’appelle Mondine il est bien emballé par notre truc et me propose de passer en parler dans son émission Radio H sur Radio Campus Montpellier le week-end suivant. Le rendez-vous est pris !

Pour ma part je garde tout de même Binam’ (le chanteur-batteur-fondateur de René Binamé) à l’œil. C’est qu’on voudrait le choper pour l’interviewer, le bougre ! On y arrive, on se faufile en « backstage » (le grand mot) pour être au calme.

Après l’interview on lève le camp, contents de la soirée. Espérons que le KJBI perdure pour continuer à nous proposer d’autre petits concerts sympas comme ça (avec un meilleur son espérons !). Signalons également que les René Binamé jouaient le lendemain à la Plaine à Marseille en soutien aux personnes arrêtées lors du carnaval de la Plaine et dont certaines ont pris de la prison ferme.

par M.

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Concert de soutien au Testet avec La Compagnie Kta !

Samedi 25 octobre avait lieu à 10 km de Gaillac, dans le Tarn, un grand rassemblement pour dire non à la disparition de la zone humide du Testet. Déjà sérieusement amputée de ses arbres, le Conseil Général du Tarn souhaite construire sur cette zone un barrage afin d’irriguer les champs d’une vingtaine d’agriculteurs productivistes. Pour soutenir la ZAD du Testet le collectif Mérindol des Landes organisait un concert le même jour avec au programme, entre autres, La Compagnie Kta. Nous avons rencontré les membres du groupe à la fin de leur prestation pour leur poser quelques questions sur leur soutien aux opposants au barrage et sur leurs chansons. Quelques heures plus tard, au Testet, Rémi Fraisse mourrait assassiné par la police.

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Spasme ! : Bonjour, pour commencer pouvez-vous vous présenter ?

Fred : On est la Cie Kta, on existe depuis 10 ans, avec Anne qui est conteuse et moi qui suis musicien. On a commencé par du conte musical traditionnel, après on a raconté nos histoires et progressivement ça s’est orienté vers ce qu’on peut trouver dans Drôle de France [leur spectacle actuel, ndlr] avec des histoires de destins singuliers, de héros du quotidien, ordinaires et banals, qui ont décidé de refuser le système qu’ils subissaient, l’inhumanité et l’injustice.
Ensuite on a rencontré Cyril donc on a agrandi le groupe. La Cie Kta embauche ! Nous sommes des entrepreneurs du service public et de la culture pour tous ! (rires) Nous nous sommes peu à peu orientés vers un son plus rock, plus punk, parce qu’on est quand même profondément anarchistes malgré les apparences.
Le répertoire s’est monté au fur et à mesure, au  départ on avait quelques histoires qui étaient alimentées par le public qui nous donnait des pistes. Comme Gaspard De Besse c’est l’exemple qui est dans l’album…

S : Qui est Gaspard De Besse ?

Anne : Gaspard de Besse c’est le Robin des bois du Var. Il était à Besse-sur-Issoles, dans les gorges d’Ollioules, et il ne tombait que sur les usuriers, les collecteurs d’impôts. Il récupérait les sous, en gardait une petite part pour la bande parce qu’ils étaient quarante et qu’il fallait bien qu’ils bouffent et le reste il le rendait à la population. Gaspard de Besse était super populaire et les gens les cachaient. Ils ne disait rien et le protégeaient du mieux qu’ils pouvaient. Il s’est fait exécuté à Aix-en-Provence en 1781.

S : Avant de revenir à ce que vous faites, pouvez-vous déjà nous dire un peu pourquoi vous êtes ici ce soir ?

A : En France nous avons des zones humides qui sont des réservoirs d’eau, elles abritent des espèces endémiques et au nom de la productivité et des grands projets inutiles on veut éradiquer toutes ces populations et mettre du béton là où il y a de la verdure. Dans ce cas précis, un barrage va être construit pour faire des hectares et des hectares de culture intensive de maïs pour donner à bouffer à des animaux qui sont dans des conditions pitoyables.
Il faut que nous réalisions qu’au rythme actuel, tout les sept ans il y a l’équivalent d’un département qui est mis sous le béton et que nous n’avons plus d’autonomie alimentaire. Cela doit changer, le seul moyen de récupérer notre pouvoir c’est d’avoir une autonomie alimentaire et énergétique. Du coup, nous essayons de monter des systèmes parallèles qui permettent aux êtres humains de vivre dignement. Par ailleurs, si le gouvernement utilise son pouvoir pour aider des entreprises qui détruisent notre nature et nos moyens de vivre c’est notre devoir de citoyens et de citoyennes de s’élever contre parce que la République c’est un long combat, c’est un rêve qui a été émis en 1789 avec une Charte des Droits Humains… (Plus exactement des Droit de l’Homme en 1789 parce que la femme évidemment ne semble pas rentrer tout de suite dans l’humanité…)
À l’école laïque républicaine, on nous a fait croire que tout ça est acquis, que la démocratie est acquise, que la liberté, l’égalité et la fraternité c’est le combat du gouvernement chaque jour et puis nous nous rendons compte que ça n’est pas la réalité. Le barrage du Testet, c’est comme Notre-Dame-Des-Landes, ce sont des exemples de non-concertation avec la population, donc c’est important d’en parler et de parler de tous les autres moments de l’histoire où les humains se sont dit : « Non on va pas se faire avoir, on va pas se faire marcher dessus, on va s’organiser, on va lutter, on va être solidaires ». La force du peuple est mille fois plus forte que celle du gouvernement qui mine de rien est tout petit.
Nous avions regardé sur Internet les forums de gendarmes au moment où à NDDL c’était vraiment très très hard et ils disaient que s’il y avait des ZAD partout ils ne pourraient rien faire.
Durant le concert de ce soir nous n’avons pas fait 1851, mais en 1851 il y a eu une grosse révolte dans les Basses-Alpes au moment où Louis Napoléon Bonaparte a fait son coup d’État pour devenir Empereur. Le peuple a réussi à prendre les deux sous-préfectures et la préfecture sans verser une goutte de sang parce qu’avant il s’était organisé. Au lieu d’aller chez eux en rentrant du boulot, les gens allaient dans ce qui s’appelait des chambrettes. C’étaient des réunions où ils mangeaient, ils buvaient et ils parlaient politique. Et toutes ces chambrettes étaient fédérées. Quand la nouvelle du coup d’État est arrivée ça a fait le tour de toutes les chambrettes et la population a levé 10 000 hommes en trois jours ! Nous avons avec cet exemple la preuve que quand tout un département se soulève d’un coup, l’armée ne peut rien faire. Cette dernière est allée se planquer mais les révoltés n’étaient pas assez nombreux. Le problème c’est qu’en 1848 il y avait eu une grosse révolution qui avait était réprimée dans le sang donc cette fois-ci il y a plein d’endroits où les gens ne se sont pas battus contre l’Empire. Si tout le monde s’était soulevé en même temps nous aurions peut-être pu retenter une République du peuple, pour le peuple, par le peuple, mais là ils se sont fait écraser. Mais quand même, nous savons que c’est important de s’organiser et de se fédérer. Le peuple uni jamais ne sera vaincu, et ça nous en sommes persuadés.
Aujourd’hui nous déléguons tous nos pouvoirs, à l’État, aux politiciens, aux professeurs, et peut être que par l’imagination nous pouvons récupérer notre pouvoir.

S : Alors justement tu parles de citoyens, citoyennes, de République, mais tous les problèmes que tu viens d’évoquer ne sont-il pas intrinsèques à l’idée de République ?

Anne : Non, je défends le rêve des premières personnes qui ont imaginé la République et ce rêve c’était liberté, égalité, fraternité. Cependant, 51 % des gens étaient exclus de ce rêve là puisque les femmes n’en faisaient pas partie*. Je me suis vraiment pris la tête sur le droit de vote et sur le fait d’aller voter. À chaque fois que je n’avais pas envie d’aller voter j’ai pensé à ma grand-mère qui a tout fait pour qu’on puisse voter. Mais là on arrive à une limite, donc peut-être qu’en 45 on pouvait avoir de l’espoir après la guerre – tout avait été détruit du coup il fallait tout reconstruire – mais aujourd’hui on le voit bien, chaque fois on nous présente des gens pour qui voter mais que nous n’avons pas choisis. Et quand un petit parti se présente il n’a pas les moyens d’être aussi visible que les gros.

S : Dans ce numéro on met un texte d’Élisée Reclus qui disait « voter c’est abdiquer ». Donc déjà bien avant l’époque de ta grand-mère certains mettaient déjà en doute le principe d’élire des gens auxquels ont délègue le pouvoir. Qu’est-ce que tu en penses ?

A : Je ne sais pas. Si tu prends les pirates, ils élisaient leur capitaine. Mais ils avaient le contrôle sur leur capitaine. Si le capitaine ne faisait pas ce qui avait était décidé par l’équipage on le démettait de ses fonctions et on l’abandonnait sur une île déserte. Mais le principe des pirates c’est qu’ils discutaient tout jusqu’au consensus et quand ils étaient trop nombreux ils faisaient de petits groupes et ils avaient un représentant par groupe. Le truc c’est que si tu veux que tout le monde puisse avoir la parole et puisse s’exprimer il faut bien faire des petits groupes. Et c’est dans des petits groupes que tu peux exercer une vraie démocratie. Des anthropologues anarchistes ont montré que la démocratie n’est pas un concept exclusivement occidental. Il y a plein de tribus dans lesquelles la démocratie a vraiment existé, mais c’était des petit groupes ! Quand tu dépasses trente personnes la démocratie n’est plus possible.
La République telle qu’elle a été faite a détruit toutes les langues régionales, elle a essayé d’imposer une seule langue pour permettre l’administration et l’unification de tout le monde. En fait, cette unification elle a tué toutes les différences culturelles, elle a uniformisé. Et puis elle nous a inventé un rêve de France, mère patrie, qui s’occuperait toujours de nous et qu’on a toujours eu dans la tête. Finalement c’est pareil qu’à l’époque des rois, le truc paternaliste où on va s’occuper de vous parce que  nous ne serions sois-disant pas capable de nous occuper de nous-mêmes.
Il y a vraiment eu un espoir avec la République. En 1851, dans les discours d’André Ailhaud, la République doit être construite par tous. Et donc pour la construire il faut qu’e nous la prenions en main et que nous soyons responsables en tant que peuple et ne pas laisser les élites décider à notre place. Pendant la Commune de Paris les gens ont élus un gouvernement, quand ce gouvernement a voulu faire de sessions à huis clos, le peuple s’est remis devant en disant : « Y a pas moyen, nous on veut savoir ce qui se passe! » Et parfois savoir ce qui se passe nécessite de prendre le temps. Peut-être qu’aujourd’hui, vu que le plein emploi n’existe plus, il y aura de plus en plus de gens qui auront du temps et qu’avec ce temps-là nous pourrons nous investir à nouveau dans la vie de la cité. Nous pourrons prendre le temps de décider si là on fait plutôt un parking ou un parc. Parce que le consensus ça prend du temps. Si nous n’en avons pas on ne peut atteindre le consensus, donc on va au vote parce que ça va au plus vite. Mais le consensus c’est quand même le plus intéressant parce que quand quelqu’un n’est pas d’accord, le but n’est pas de le convaincre, mais de prendre le temps de comprendre pourquoi il n’est pas d’accord. Ensuite cela permet d’intégrer son objection et de faire une nouvelle proposition qui la prend en compte. Ça demande du temps mais c’est ce qui est le plus démocratique et ça les Indiens d’Amérique le pratiquaient, les pirates le pratiquaient, etc.

S : Je reviens sur votre projet musical. J’aimerais savoir ce qui vous a amenés à cette forme entre spectacle et concert et comment est venue cette idée de fresque historique en résonance avec le présent.

A. : La bataille de l’imaginaire. Moi, à l’école on ne m’a jamais parlé de la Commune. Je me suis retrouvée avec une prof qui adorait Napoléon. Quand j’ai appris l’existence de la Commune de Paris, je me suis dit qu’on aurait dû passer au moins deux mois sur ce sujet parce que c’est une vrai expérience de démocratie, d’autogestion…

Kryl : C’est pour ça qu’on ne nous en parle pas à l’école. Parce que c’est une vrai expérience de démocratie et d’autogestion. L’autogestion si tu en parles à l’école c’est fini, tu rentres plus dans le moule, tu vas plus aller voter pour les gens pour qui on te dis d’aller voter…

A. : Nous, nous nous disont qu’en racontant ces histoires  nous pouvons faire prendre conscience à tout le monde qu’on a un pouvoir, que le peuple a un pouvoir, qu’on est capable, qu’on est expert en tout ce qu’on veut en fait. Tu vois, moi j’ai rencontré une meuf qui me disait : « J’ose pas aller au conseil municipal parce que je me suis dis je suis pas assez intelligente pour ça ». Et puis elle est allé au conseil municipal, elle a vu comment ça se passait, elle est revenue et elle m’a dit : « Ok, si je peux. J’ai grave les moyens de le faire en fait !» Elle s’est présentée, et voilà. Nous en avons rencontré plein de gens dans des petits bleds qui commencent à récupérer les conseilles municipaux et a inventer de nouvelles façons de faire de la politique. On a rencontré des gens qui vivaient dans une espèce de lieu collectif où ils sont super nombreux et tout d’un coup ils ont tous pris leur carte d’électeur. La mairie, elle a flippé ! Ils se sont présentés avec une campagne délirante. Petit à petit on en prend conscience, on ne peut pas laisser les politiciens s’occuper de nous alors qu’ils servent les intérêts des grosses entreprises et des puissants.

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S. : Dans vos concerts il y a une part importante consacrée au féminisme. C’est quelque chose qui parfois dans l’histoire libertaire ne paraît pas primordiale alors que plusieurs acteurs de cette tendance politique ont pris des positions fermes en faveur du féminisme. J’aimerais savoir comment est venue votre volonté de l’intégrer à vos spectacles ?

A. : De mon expérience personnelle !  Quand je me suis aperçue que j’étais prise dans un carcan, que j’avais encore des idées et des façons de faire qui sont d’un vieil âge et qui viennent de notre servitude ancestrale. J’ai bossé aussi sur les esclaves aux États-Unis, en lisant Howard Zinn notamment, il y a tout un chapitre dans son Histoire Populaire des États-Unis où il met en parallèle l’histoire de esclaves et l’histoire des femmes, en disant que les esclaves et les femmes étaient dressés de la même manière. On te fait perdre la confiance en toi, on te dit que tu n’es pas capable de vivre toute seule, que tu dois être bien contente parce qu’on te nourrit et qu’on s’occupe de toi. Donc il faut que tu sois dans la gratitude, la gentillesse. Sauf qu’à un moment on a reconnu que les esclaves avaient été esclaves et que ce qu’ils avaient vécu c’était pas bien. Alors que les femmes non !
En plus, en France on a les féministes des années 70 qui disent : « On a tout gagné pour vous !» Certes ce qu’elles vivaient avant était horrible et depuis on a gagné des droits sur l’appropriation de notre corps, de nos idées… On est devenues majeures alors qu’avant on étaient mineures. Mais elles ont l’impression qu’elles ont tout gagné, alors que non ! J’ai eu des disputes avec des vielles féministes qui me disaient : « Mais c’est bon, pourquoi tu râles encore ! Tu es encore en train de pleurer sur ta condition, moi j’aurais rêvé d’être à ta place. À ton âge j’avais déjà trois gamins, j’étais d’un milieu rural…» Certaines on eu des vies difficiles, je reconnais… Pour ma part j’ai 36 ans, je suis célibataire, il n’y a personne qui m’emmerde, j’ai pas d’enfant. Je suis certainement plus libre qu’une femme d’il y a trente ou quarante ans, mais bon on est toujours pas payées au même salaire pour le même poste et quand tu regardes les chiffres c’est hallucinant. Si tu observes les chiffres de la culture il n’y a que 10 % de femmes qui sont programmées. Il y a des théâtres où il n’y a même pas une femme dans la direction. Il y a une association qui s’appelle les Femmes à Barbe qui va dans les conseils d’administration des entreprises pour mettre le doigt là-dessus. J’ai vu l’action qu’elles ont faite au théâtre de l’Odéon. Elle sont montées sur la scène avec leur barbe et elles ont dis :« On est ravies que vous défendiez la culture universelle !» Ensuite, elles ont pris les programmes et ont montré qu’en huit ans il y avait eu seulement une femme metteuse en scène et le texte d’une femme, tout le reste c’était des hommes blancs. De temps en temps il y avait un Haïtien ou un Sénégalais, pour montrer qu’on est pour la diversité, mais pas de femme. Après leur intervention les gens ils ont fait : « C’est vrai, on s’en était même pas rendu compte ».
Du coup moi je vois ma propre aliénation, ce que j’ai dû mettre en place justement grâce au travail des féministes pour me rendre compte de mes comportements de servitude. Et au bout d’un moment nous voulions en parler, je trouve que c’est un super exemple. Le peuple et les femmes même combat ! En montrant l’histoire des femmes, en mettant le doigt dessus déjà nous pouvons faire prendre conscience que les femmes son entrées dans l’Histoire. Je reprends ce discours de Sarko** parce que c’est le même truc. En fait les femmes sont entrées dans l’histoire, mais on les en a éradiquées !
Il faut que les femmes prennent conscience qu’elles ont toujours été là, qu’elles ont toujours fait quelque chose, qu’elles ont toujours été en mouvement et qu’elles ont toujours été les premières à monter au créneau. C’est les femmes qui élèvent les enfants, qui voient leur mari triste, leur frères qui ne va pas bien. C’est les femmes qui prennent ces choses-là en main. C’est elles qui sont allées chercher le roi en 1789. C’est les femmes de la Commune de Paris qui ont monté l’Union des Femmes et qui ont ouvert les églises, les ateliers. Mais à l’école nous n’apparaissons pas car nous n’avons jamais eu le pouvoir dans les mains, donc nous n’avons jamais écrit de lois, nous n’avons jamais fait de guerre et du coup nous n’existons pas. Avec la Compagnie Kta nous prenons l’Histoire d’un autre point de vue pour montrer que les femmes sont super présentes et que si elles reprenaient leur part de pouvoir comme elles l’avaient avant, elles pourraient rééquilibrer la société et la rendre plus humaine. Parce que c’est quand même les femmes qui sont dans la transmission, et là je suis désolée il y a peut-être des gens qui vont pas du tout aimer que je dise ça. Dans cette transmission on rêve d’un monde meilleur ! Donc les femmes elles peuvent énormément apporter à notre désir de vivre dignement, bien et simplement.

Kryl : Là t’as au moins 56 pages de fanzine…

S. : Pour terminer, il paraît que vous allez sortir un CD bientôt, pouvez-vous m’en dire plus ?

Fred : On espère au mois de janvier oui, on est en fin de mixage. Il y a neuf titres. Deux chansons n’y sont pas pour des raisons de droits d’auteur c’est À bicyclette et Douce France en version punk. Même si on a modifié un peu les paroles de base, on s’est dit on sait jamais…

K. : Et ça sort en vinyle et CD.

S. : C’est pas un peu passéiste le vinyle ?

A. : Mais non c’est l’avenir.

F. : Une industrie pas du tout polluante…

K. : Les vinyles on pourra les faire tourner à la main alors qu’un cd c’est chiant. ■

Propos recueillis par M.

*Les femmes représentent aujourd’hui 51% de la popultation française, en revanche nous n’avons pas les chiffres de l’époque, ce qui ne change pas grand chose dans le fond.

** Discours de Nicolas Sarkozy à Dakar le 26 juillet 2007 où il décrivait « le drame de l’Afrique » selon lui : « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire. […] Le problème de l’Afrique, c’est qu’elle vit trop le présent dans la nostalgie du paradis perdu de l’enfance. […] Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine ni pour l’idée de progrès ».

J’ai vu un concert de punk dans une ville FN

Lorsque j’ai vu que les Ramoneurs de Menhirs passaient pas trop loin de chez nous, je me suis dit que ça serait une bonne occasion d’aller les voir. J’étais tout de même perplexe concernant la ville où le concert avait lieu. Bollène, ville dirigée par Marie-Claude Bompard, de la Ligue du Sud, parti d’extrême droite regroupant des anciens du FN, ne semble pas forcément être la plus punky…

L’entrée dans Bollène vaut déjà des points à elle seule. Nous prenons le rond-point à la sortie de l’A9 et passons l’avenue Salvador Allende pour prendre l’avenue Jean Moulin, celle sur laquelle se trouve la salle Georges Brassens où a lieu le concert. On roule quelques centaines de mètres pour constater que la salle est sur notre gauche, on tourne donc au rond-point Lucie Aubrac et on se gare sur le bord de la rue Jules Ferry. Si une ou un bollènologue venait à nous lire, j’aimerais avoir une petite explication à propos des noms des rues et de cette salle dans cette ville faf. (On me dit dans mon oreillette qu’il s’agit de vestiges de l’époque coco de Bollène.)
Rappelons qu’à la commémoration de l’appel du 18 juin en 2012 la maire Bompard avait fait interdire le Chant des Partisans. On peut s’en foutre des commémorations diverses, cet événement en disait quand même long…
Enfin bon on s’égare un peu là, place au concert !

21h30, le parking est plein. Avec ma dulcinée nous scrutons les abords de la salle à la recherche de Rnest et Dé2. Personne à l’horizon, donc je tente de les appeler vu qu’on devait se retrouver à ce concert, mais pas de réponse. Pour le coup nous passons par la case « bar » histoire de nous mettre en jambes. Le demi de base est à  2,50€, ça pique un peu pour un concert punk… Heureusement les deux gars de la sécurité à l’entrée sont plutôt coulants et ne regardent pas trop le contenu des sacs.
Nous arrivons durant le set de Panika qui remplace les Bouilleurs de Cru. Ne connaissant aucun des deux groupes je ne pourrais pas comparer. Ils peinent un peu à faire décoller l’ambiance et ont un peu l’air de se faire chier sur la fin. Ça ne me laissera pas un souvenir impérissable…
Petite pause dehors où il y a pas mal de monde. Loran, le guitariste des Ramoneurs sort de son camion qui est juste à côté de nous. J’en profite pour lui glisser un Spasme !.
On teste de rappeler les collègues, mais toujours rien… Ça commence à ressembler à un lapin.

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C’est l’heure de Fiction Romance que je ne connaissais pas. Ils envoient direct le bois.  J’ai pas eu l’impression qu’on risquait la méningite à trop réfléchir pendant leur chansons, ce qui pour moi n’est pas un reproche. On a vite fait de reprendre les chœurs présents dans bon nombre de leurs chansons. Notons la reprise de Jouer avec le feu des Shériff dont le refrain est un de mes préférés dans le punk français (J’aime jouer avec le feu / Mais j’aime pas me brûler!). De toute façon j’aime à peu près tous les morceaux des Shériff. Les côtés pas super revendicatifs, looser et un peu lâches me plaisent beaucoup.
La température dans la salle monte au sens propre comme au figuré et ça commence à sentir franchement la sueur. Nous décidons de ressortir un peu à l’air frais et c’est de dehors qu’on entend le set se terminer. Dernière tentative pour appeller des deux copains. Toujours rien, c’est officiel, ils ne sont pas venus. Je tente un SMS qui dit “Bandes de faux punks”, mais pas de réaction. Le lendemain, j’apprendrai qu’ils étaient “fatigués”…

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23h30 ou peut-être minuit, nous sommes de nouveau dans la salle et les Ramoneurs sont sur scène, prêts à commencer. Je dois bien l’avouer : j’ai beau aimer le délire trad/punk, à la longue à écouter à la maison, je trouve que leurs morceaux se ressemblent et le biniou me fatigue vite. Par contre, en live, l’énergie de cette fest-noz à crêtes ne se discute pas. Le pogo démarre direct devant la scène et ne s’arrêtera pas du concert.
Accompagnant la bombarde et le biniou on retrouve bien les sons de gratte et la boîte à rythme qui ont fait le succès des Bérus en leur temps.
On relèvera deux chansons sur Notre-Dame-des-Landes que le groupe ne peut que défendre vu leur proximité géographique et politique avec le mouvement de résistance qui s’est développé face à l’ « Ayraultport ».
La reprise de If The Kids Are United des Sham 69 a fait son petit effet, tout comme le classique Bella Ciao. Aux deux tiers du concert Loran annonce une demi-heure de reprise des Bérus, ce que visiblement beaucoup attendaient. Les Ramoneurs ont donc envoyé les « tubes » : Vive le Feu, Hélène et le Sang, Ibrahim, Protesta, Petit Agité, et j’en passe. On pouvait pourtant ressentir ce moment un peu comme un passage « forcé ». Plusieurs fois dans le concert on aura remarqué l’agacement de la part de Loran face à la demande d’une partie du public qui vient parce qu’il veut voir les Bérurier Noir plus que les Ramoneurs de Mehnirs. Il sortira d’ailleurs à un mec : « Les Bérus c’est comme le LSD, c’est pas bon quand on reste bloqué ! ». Plus tard, après qu’on ait entendu dans le public le célèbre refrain : « La Jeunesse emmerde le Front National ! », il rétorque : « Depuis le temps, si la jeunesse l’emmerdait vraiment le Front National, on n’en serait pas là ».
Bref, on sent qu’il souhaiterait simplement que les gens arrêtent de le ramener à ce qu’il a fait dans les années 80 et considèrent un peu plus ce qui se fait aujourd’hui avec les Ramoneurs. Malheureusement pour lui c’est ça la célébrité.

À la fin le groupe repart sur ses compos. La fatigue commence à se faire sentir et nous décidons de décoller vers 2 heures du mat’ (ils auront joué plus de deux heures). Alors oui je me suis foutu de la gueule des mes collègues qui ne sont pas venus parce qu’ils étaient fatigués, mais là c’est différent donc allez vous faire foutre.

En conclusion, on pourra retenir que l’ambiance était bonne et que les Ramoneurs de Menhirs gagnent clairement à être vus en concert. Le mélange qu’ils ont réussi à concocter entre musique traditionnelle bretonne et musique punk fonctionne bien, malgré un côté parfois un peu répétitif.
Ça m’a agréablement rappelé les années où on vivait au Pays Basque avec Acido-basique. Ce soir-là à Bollène-la-Brune on a retrouvé un peu de l’énergie que savent si bien dégager les groupes venant de ce genre de coin de la France et c’est toujours ça de pris !■

M.